Il n'existe pas de meilleur contexte pour observer la condition humaine qu'en première ligne d'un conflit ou au lendemain d'une expérience traumatisante. En couvrant le massacre de Rabaa au Caire, en Égypte, et la violence conjugale dans les camps de réfugiés en Irak, la cinéaste et ambassadrice Canon Elisa Iannacone a développé une compréhension plus profonde du traumatisme ; non seulement ce que cela signifie pour les victimes, mais aussi comment le présenter au monde.
Elisa s'est maintenant éloignée des reportages sur les conflits, mais continue d'utiliser ses compétences d'artiste visuelle pour explorer les traumatismes et la conscience sociale. En tant que cinéaste et photographe, elle a produit des œuvres pour National Geographic, Newsweek, Vice et la BBC, et ses films ont été présentés dans des festivals de cinéma du monde entier. Par l'intermédiaire de son agence média Reframe House, elle réalise des projets multimédias pour les entreprises et les particuliers qui souhaitent faire une réelle différence. Désormais, Elisa est également une auteure publiée, une intervenante TEDx et une conférencière occasionnelle, et deux grandes universités travaillent sur son approche pour créer des liens avec les victimes de violences.
PROFIL
Elisa Iannacone
Elisa est née au Mexique d'une mère mexicaine qui parlait peu l'anglais et d'un père canadien qui ne parlait presque pas espagnol. « Je pense que le fait d'avoir assumé ce rôle d'interprète à un âge précoce a beaucoup influencé ma carrière ultérieure, qui a beaucoup à voir avec l'interprétation de ce que les gens ressentent à travers des visuels », dit-elle.
Après avoir supplié ses parents de lui offrir un appareil lorsqu'elle était enfant, Elisa s'est consacrée à capturer le monde qui l'entourait. « Mes parents m'ont acheté un tas de pellicules avec l'appareil, et s'attendaient à ce qu'elles me durent toute l'année. Je les ai toutes utilisées en quelques jours », se souvient-elle. « C'était comme ouvrir une fenêtre. Une fenêtre que personne d'autre ne pouvait voir et que je pourrais partager avec les gens si je prenais seulement ce cliché. »
À l'âge de 12 ans, Elisa a décidé qu'elle voulait être réalisatrice. Les maladies récurrentes de son adolescence l'ont obligée à passer beaucoup de temps à la maison à regarder des films. « Les films représentaient le monde où je pouvais être quelqu'un qui n'était pas malade. Grâce à cet espace magique, les films étaient toujours une sorte d'espoir pour ma propre vie. »
À 18 ans, elle s'est inscrite au cours de production cinématographique de l'Université York à Toronto, au Canada, et s'est spécialisée en cinématographie. Quelques années plus tard, une maîtrise en journalisme international de la City, University of London (Royaume-Uni), lui a donné les compétences dont elle avait besoin pour raconter des histoires en première ligne.
Domaines de spécialité : réalisation de documentaires, mutations sociales
Kit préféré :
Canon EOS C300 Mark II (désormais remplacé par le Canon EOS C300 Mark III)
Canon CN-E24mm T1.5 FP X
Elisa a acquis une expérience inestimable en tant que reporter de guerre lorsqu'elle a couvert le massacre de Rabaa en Égypte en 2013. Elle a notamment réalisé des séquences vidéo et des photos pour des médias d'envergure internationale. Bien qu'elle ait continué à remplir ce rôle en Jordanie et en Irak après son retour d'Égypte, c'est au Caire que son rapport au journalisme de première ligne a été modifié à jamais. « Je me suis fait tirer dessus. Certains de mes amis ont été abattus. Je me suis dit : 'Quelle guerre suis-je en train de mener, et pour quelle raison ?' Les organes de presse n'auraient même pas publié tout mon contenu à cause de l'ampleur de la destruction qu'il montrait. »
Elisa s'est dit que les gens n'étaient pas capables de voir l'ensemble du massacre et savait qu'elle devait trouver un autre moyen de raconter ce qui se passait réellement. Elle a changé de cap pour s'intéresser aux survivants de violences et a recherché de nouvelles façons d'exprimer les traumatismes à travers l'art. Plutôt que de simplement pointer son appareil vers ses sujets, elle choisit maintenant d'apprendre à connaître les personnes avec lesquelles elle travaille et de les responsabiliser en les impliquant dans le processus de création.
« Si quelqu'un me dit : 'J'ai eu l'impression de me noyer ou d'être pris au piège', je demande : 'À quoi cela ressemblerait-il si vous pouviez l'extérioriser ?' Ensuite, je commence à esquisser ce qui vient à l'esprit. »
Le travail d'Elisa est profondément intimiste. Certains de ses projets prennent des mois à planifier et à exécuter, mais elle parvient à établir un lien profond avec ses sujets, même au milieu du chaos des zones de conflit. L'intimité et la connexion définissent son style, qu'elle prenne des photos ou réalise des films, mais la cinématographie est toujours au cœur de sa véritable passion, qu'il s'agisse d'un documentaire, d'une pièce de théâtre ou d'une publicité. « Essayer de raconter une histoire avec une seule image est un défi ludique », s'amuse-t-elle, « mais c'est à travers le film qu'une personne prend vraiment vie. »
Afin de se connecter à un niveau intime, Elisa utilise des objectifs grand-angle tels que le Canon CN-E24mm T1.5 FP X qui lui permettent de se rapprocher de ses sujets. « J'aime l'idée d'être physiquement proche de quelqu'un. Cela prend du temps, mais permet de briser la ligne d'intimité. Lorsque vous êtes proche, vous êtes là avec cette personne et avec son monde, car vous pouvez avoir une idée de son point de vue. »
L'Open University au Royaume-Uni et une autre université en Irlande travaillent actuellement sur les méthodes d'Elisa afin de mettre au point une méthodologie thérapeutique qui permettrait d'exprimer des traumatismes à travers l'art. Elle continue de travailler avec des victimes de violences, tout en subvenant à ses besoins en mettant à profit ses compétences et collabore avec de grandes marques qui veulent insuffler un changement.
Qu'est-ce qui vous a inspiré à commencer une carrière en couvrant la guerre, les catastrophes naturelles et les questions relatives aux droits de l'homme ?
« Je me suis spécialisée dans le journalisme international et la production télévisuelle à l'université, puis je me suis spécialisée davantage dans la réalisation de reportages sur les conflits. À cette étape de ma vie, je croyais que mon avenir serait entièrement consacré à la réalisation de reportages sur les conflits. Et dès que j'ai obtenu mon diplôme, je suis allée en Égypte quand le massacre de Rabaa s'est produit. J'ai ensuite réalisé des reportages sur les camps de réfugiés syriens en Jordanie avant de me rendre en Irak. »
Qu'est-ce qui vous motive à aborder ces sujets complexes ?
« Couvrir le conflit en Égypte a été la période la plus difficile de ma carrière. Ma vie était en jeu, je travaillais en portant un masque à gaz, je me faisais tirer dessus, j'étais témoin de la douleur humaine à chaque seconde de la journée et je fonctionnais à l'adrénaline sans dormir. Être témoin de tant de cruauté me motivait au quotidien. J'avais l'impression que mon travail allait bien au-delà du simple témoignage. Cela m'a permis d'en apprendre davantage sur la condition humaine, sur notre comportement dans les moments de pression extrême et sur la façon dont nous gérons le stress lors de la perte d'un être cher. »
Comment trouvez-vous et racontez-vous des histoires invisibles dans un sujet d'actualité ou un problème ?
« Beaucoup d'Égyptiens ne savent même pas ce qui s'est passé lors de ce conflit. En effet, mon travail n'a pas beaucoup été publié par les médias, car j'ai pris en photo des personnes mortes. Cela m'a rendue furieuse, puis j'ai réalisé que ce n'était pas de cette manière que j'allais changer le monde. La fatigue compassionnelle est réelle, et les gens ne peuvent pas recevoir autant d'horreur en permanence. J'ai donc changé de cap et décidé de travailler sur des sujets difficiles, tout en essayant de les présenter sous un autre angle, un angle plus accessible. C'est ce qui m'a amenée à travailler avec des survivantes de viol dans le monde entier. J'ai décidé de ne pas les présenter de manière photojournalistique en noir et blanc, mais de redonner le pouvoir aux victimes et de leur permettre de se montrer sous un nouveau jour, dans toute leur puissance. Cela a permis aux gens de regarder leurs histoires et d'intégrer les événements sans ressentir la même douleur que nous ressentons toujours face aux horreurs du monde. »
Qu'est-ce qui vous a poussée à créer Reframe House et quelles sont vos ambitions pour cette agence média ?
« Le travail de recadrage ne se limite pas à prendre votre appareil et à le pointer vers un sujet. Il consiste à recadrer la vie, en utilisant un appareil. Il s'agit d'une relation symbiotique : vous utilisez des photos, des vidéos ou même des projections holographiques pour créer un changement dans le récit. Reframe House est une entreprise, et nous voulons utiliser cette méthodologie pour présenter des sujets importants, qu'il s'agisse de conflits ou d'énergie verte, d'une manière inédite. Nous travaillons avec des entreprises et des investisseurs d'impact pour apporter un changement tangible dans le monde, au lieu de 'cocher des cases' de responsabilité sociale des entreprises. Notre méthode est plus empathique et peut donc être plus facilement perçue par les gens : le public devient donc actif plutôt que passif. »
Quels conseils donneriez-vous aux cinéastes en herbe ?
« Ne vous limitez pas aux barrières que l'on vous impose. Si quelqu'un vous dit que vous ne pouvez pas faire de théâtre parce que vous êtes journaliste/cinéaste, dites-lui qu'il se trompe. En nous mettant dans des cases, nous perdons notre opportunité d'évoluer techniquement, mais aussi d'évoluer en tant que personne. Le monde a besoin d'un sens plus profond. Pour moi, il s'agit donc de suivre votre passion et votre âme. Il existe un cheminement de carrière qui n'a jamais été emprunté, et vous pouvez en être le fer de lance. »
Ce que je sais
Elisa Iannacone
« Parfois, capturer des sujets en noir et blanc les victimise à nouveau et immortalise un moment de traumatisme qui les empêche d'avancer. Assommer les gens avec des images de destruction peut en fait les rendre plus passifs et a tendance à générer une fatigue compassionnelle. Présenter des sujets avec une approche plus empathique leur permet de partager leurs histoires, et les autres peuvent ainsi mieux les comprendre. »
Instagram :@elisaiannacone / @reframehouse
Site Web :www.elisaiannacone.com / www.reframehouse.com
Équipement d'Elisa Iannacone
Kit utilisé par la plupart des photographes professionnels
Appareils
Canon EOS C300 Mark III
Le successeur de l'appareil de prédilection d'Elisa intègre le capteur Canon DGO 4K Super 35 mm avec la fonctionnalité de ralenti 4K 120P, la plage dynamique étendue et l'autofocus CMOS Dual Pixel. Elisa ajoute : « Mon appareil de prédilection pour me rapprocher des sujets lors de la réalisation de documentaires et de films journalistiques. »
Canon EOS 5D Mark IV
Conçu pour offrir des résultats exceptionnels dans toutes les situations, l'EOS 5D Mark IV est un appareil photo polyvalent complet d'un très beau design. « Mon premier Canon était un 40D et j'en suis tombée amoureuse. J'envisage de passer à l'hybride, mais le 5D Mark IV m'offre tout ce dont j'ai besoin pour l'instant », ajoute Elisa.
Objectifs
Canon CN-E24mm T1.5 FP X
Conçus pour offrir un rendu délicat et subtil de tous les sujets, ces objectifs à focale fixe Sumire offrent une ouverture rapide et un contrôle manuel précis avec de magnifiques flous d'arrière-plan pour une créativité sans limites.
Canon CN-E50mm T1.3 FP X
Personnalisez votre travail avec ce superbe objectif à focale fixe Sumire, doté d'un « aspect cinématographique » étudié et d'une monture PL interchangeable. « Travailler avec des objectifs de 50 mm est formidable en raison de la faible profondeur de champ qu'ils offrent lorsque je veux garder la mise au point uniquement sur mon sujet », déclare Elisa.
Canon EF 24-70mm f/2.8L II USM
Zoom standard de qualité professionnelle offrant une qualité d'image exceptionnelle et une ouverture lumineuse de f/2,8 sur toute la plage focale.
Canon EF 50mm F/1.8 STM
Effectuez une mise au point parfaitement nette sur votre sujet et obtenez de superbes arrière-plans avec effet de flou grâce à la grande ouverture de f/1.8 de l'objectif EF 50mm f/1.8 STM. En bref, réalisez en toute simplicité des photographies plus artistiques et plus percutantes.
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